Henri Salvador en blanc

HENRI SALVADOR :
90 ans passés comme l'éclair

AP. Mis en ligne le 18/07/2007

Il ne se voit pas en doyen de la chanson française, mais ses artères ont « presque un siècle ». Ce soir, à Monaco, le jour de son 90e anniversaire, Henri Salvador se produira sur scène, « le plus bel endroit pour un artiste » aux yeux du crooner en complet blanc, qui a su résister à l'assaut des modes et du temps.

Le musicien va progressivement faire ses adieux à la scène à l'occasion d'une série de galas, dont deux à Paris le 26 octobre salle Pleyel et le 21 décembre au Palais des Congrès. Mais il n'entend pas abandonner le « disque » : « j'ai encore ma voix », dit-il. « Autant m'en servir. Si je peux encore offrir quelques belles chansons aux Français, ce serait merveilleux ». Au bout de plus de 60 ans de carrière, l'artiste débarqué de sa Guyane natale l'année de ses sept ans dans la capitale, dit ne pas ressentir le poids des ans en dépit d'une pneumonie qui l'a « fatigué » après la sortie de « Révérence », son album enregistré en grande partie au Brésil, « merveille de pays », et paru l'automne dernier.

« Je me sens comme à 40 ans. Très bien », grâce à une « vie assez saine. Je n'ai pas bu, je ne me suis pas drogué, je n'ai pas fumé. Et je m'aperçois que j'ai bien fait ». « Pour moi, ça a passé très, très vite », a-t-il confié à l'Associated Press par téléphone, entre deux concerts la semaine dernière en Italie et le gala de mercredi soir au Sporting-Monte Carlo. Henri Salvador s'envolera ensuite pour le Japon — où il se produira plusieurs soirs — puis pour les Etats-Unis en septembre. « L'autre jour, j'ai rencontré les Pink Martini » qui ont repris « Syracuse » et « m'ont invité à venir la chanter avec eux » au Hollywood Bowl de Los Angeles. « J'ai dit 'volontiers' », raconte l'artiste en évoquant aussi des concerts au Brésil et au Canada.

Né le 18 juillet 1917 d'un père guadeloupéen d'origine espagnole et d'une mère, fille d'une indienne caraïbe, Henri Salvador ne « fait pas une salade » de son 90e anniversaire qu'il devait célébrer à Monaco avec des « copains », « sans falbalas », avant, dit-il, de retrouver le lendemain le prince Albert II. « Pour moi, la fête, c'est tous les jours », note-t-il.

Dans sa vie si vite passée, Salvador a fait des titres pour enfants, d'autres chansons « commerciales », « pour manger », et d'autres encore, intemporelles, comme « Chambre avec vue », chanson-titre de l'album de son retour en 2000, qui lui a valu la reconnaissance tardive de ses pairs par le biais de deux Victoires de la musique (Interprète masculin et album de variété). D'après la maison de disques V2, cet opus s'est vendu à deux millions d'exemplaires.

« Maintenant, je suis dans la période merveilleuse où je peux chanter de belles chansons, avec de belles mélodies et de belles paroles. Et alors là, je me régale », s'enthousiasme celui qui compose des mélodies au « synthétiseur » dans son studio au gré de l'inspiration. Résultat: « j'en ai 2 ou 3.000 qui dorment à la maison », précise-t-il en saluant ses paroliers, dont son ami Boris Vian, Bernard Dimey ou Gisèle Molard.

S'il a gagné un nouveau — jeune — public avec « Chambre avec vue », le génie créateur accompagnait déjà depuis plus d'un demi-siècle l'artiste à la voix de velours. « Le lion est mort ce soir », « Syracuse » ou « Le loup, la biche et le chevalier » témoignent ainsi de sa patte empreinte de poésie et de nostalgie, à l'opposé de titres à l'humour caustique, mêlant blues, rock ou biguine tels « Blouse du dentiste », « Rock and roll mops » et « Faut rigoler ». Au total, 949 titres écrits et/ou composés par Salvador ont été déposés à la SACEM, d'après la société de gestion collective du droit d'auteur pour la musique.

L'homme, qui a aussi été un grand « showman » de la télévision, a vu le jazz « transformer » sa vie, après avoir écouté à l'adolescence des disques de Duke Ellington et de Louis Armstrong. Il apprit la guitare seul avant de se lancer comme accompagnateur de musiciens — dont Django Reinhardt-, de rejoindre Ray Ventura et son orchestre, puis d'emprunter la voie du succès en solo. Derrière le paravent de l'humour et de son rire-signature, Henri Salvador a beaucoup travaillé. Devant le micro, « oreille la plus sensible au monde », « il ne faut pas chanter, il faut susurrer », expliquait-il en octobre dernier à l'AP. Donc, moi, je susurre les mots au micro comme si je faisais la cour à une femme ». L'artiste dit mener une « vie extrêmement simple » au côté de son épouse, Catherine Costa. « Je ne suis pas un people, on ne me voit pas partout », dit-il, « je suis satisfait de ma petite vie ». Une grande vie de 90 ans d'un homme qui croit à « l'éternité ».


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Henri Salvador, compositeur et interprète des chansons de Boris Vian

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