Boris Vian

100 CHANSONS

(P) & © 2009 Productions Jacques Canetti DPVF28

Recto et verso
Recto et verso

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CD4

CD4

Extrait du livret

FRANÇOISE CANETTI :
Boris Vian vue par une petite fille en 1954

Traditionnellement, nous allions au Théâtre des Trois Baudets le dimanche après midi. Bernard, mon frère, et moi avions nos places réservées dans une loge où se lovaient de justesse 4 petits fauteuils de velours rouge. Les Baudets c'était toujours la fête ; à l'entracte nous allions dans les coulisses dire bonjour aux artistes.

En 1954, au moment du spectacle Ciné-massacre, la première loge à gauche était « la loge des filles » : Rosy Varte y régnait en souveraine avec ses cheveux roux incandescents avec l'adorable Denise Benoit.

Il y avait ensuite 3 autres loges où se préparaient les autres artistes. Fernand Raynaud, Georges Brassens, Jacques Brel ou Guy Béart y ont accordé leurs guitares, Raymond Devos s'y maquillera, Gérard Séty, Robert Rollis, Pierre Repp, Phlippe Clay, Jean Yanne, Boris Vian, Bob Dupac, Darry Cowl, Robert Lamoureux… et tant d'autres y feront leurs débuts.

C'était toujours en première partie que les auteurs compositeurs interprètes, les chanteurs ou les humoristes faisaient leur tour de chant. Leur tour se composait de 4-5 chansons, rarement plus. L'entracte arrivait. Les premiers laissaient les loges aux comédiens de la seconde partie mais restaient souvent bavarder dans l'étroit couloir des loges. Certains se retrouvaient au « Chat noir » (le bar d'en face) ou filaient dans un cabaret rive gauche pour donner leur tour de chant.

Affiches des 3 Baudets C'est sous l'impulsion de mon père Jacques Canetti que Boris Vian débute sa carrière de chanteur en 1954 en première partie de Ciné-massacre de Pierre Kast ; Boris l'avait adapté pour la scène des Trois Baudets. On le retrouve en 1955 en première partie du spectacle Les Carnets du Major Thomson de Pierre Daninos ; c'est aussi en première partie de Ciné-massacre que Jacques Brel « continue » de faire ses longs débuts aux trois Baudets.

La scène des Baudets était petite et les « grands » artistes (entendez par cela « grands » par la taille) y passaient plus ou moins bien. Boris Vian en 1954-55 et Serge Gainsbourg en 1957-58 y étaient particulièrement mal à l'aise, alors que Philippe Clay (en 1953-54) s'y taille ses premiers succès d'interprète.

Installés sur nos deux fauteuils de velours rouge, nous recevions les 4 chansons de Boris Vian juste après le zozoteur de génie Pierre Repp. Habillé d'un costume style « mao », le visage de Boris était couleur cire et était totalement impassible. Il semblait jaillir de nulle part. Etait-ce le trac ou juste une attitude, son regard était fixe. Il ne faisait aucun geste sauf lorsqu'il chantait J'suis snob. Il démarrait par La complainte du progrès puis terminait par Les joyeux bouchers.

Qui était le plus mal à l'aise ? Boris ou Le public ? Les gens étaient littéralement pétrifiés, pris en tenaille par des chansons formidablement bien écrites mais interprétées de façon « minimaliste ».

Mon père avait une véritable amitié pour Boris. Quand il apprit sa mort, c'est la première fois que j'ai vu mon père si triste, comme s'il avait perdu quelqu'un de notre famille : il perdait une sorte de frère… en tous les cas un véritable compagnon de jeux.

Plus tard, Jacques Canetti eut l'idée de reprendre la seule et unique comédie musicale de Boris Vian : La Bande à Bonnot. Elle fut à l'origine créée en 1954 sur une idée de mise en scène et sur des textes de l'écrivain Henri-François Rey ; ce dernier commanda à Boris Vian les chansons avec certaines musiques de Jimmy Walter ; mais la censure de l'époque mit vite fin à cette comédie musicale à peine montée. Les partitions originales ayant été égarées, sur l'initiative de Jacques Canetti en 1975, Louis Bessières fit de nouvelles musiques. Enregistrée par Yves Robert, Judith Magre, Maurice Barrier, Cécile Vassort, Lucienne Vernay et les 4 Barbus, cette comédie musicale a été jouée au Théâtre de Boulogne dans la mise en scène de Pierre Vielhescaze.

C'est ce coffret BORIS VIAN 100 chansons que j'ai voulu ressortir, enrichi de nouveautés et inédits, pour rendre hommage à Boris Vian et à mon père Jacques Canetti qui, toute sa vie durant, a perpétué l'œuvre de son ami Boris Vian, trop tôt disparu.
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